Le jeudi 28 août 1997


Culture sportive
Pierre Foglia, La Presse

Question tordue d'une lectrice, hier matin dans la boite vocale des sports : est-ce parce que les médias jugent Caroline Brunet moins jolie qu'on accorde moins d'importance à ses trois médailles d'or qu'à la médaille de bronze d'Annie Pelletier à Atlanta ?

Réponse de mes collègues des sports : non madame, c'est parce que les Jeux olympiques sont couverts par des milliers de journalistes alors que les championnats du monde de canoë-kayak ne sont même pas suivis par les chaînes qui se consacre exclusivement au sport.

Permettez que j'ajoute quelques petites choses. Lundi matin, quand j'ai vu la grande photo en couleurs de Caroline Brunet à la une de La Presse, j'ai eu une réaction exactement contraire à la vôtre, madame. J'étais particulièrement fier de mon journal. Ce qui ne m'arrive pas tous les matins, n'allez pas croire.

Cela dit, entre vous et moi, si Jacques Villeneuve avait gagné le Grand Prix de Belgique ou si l'exploit de Caroline avait coïncidé avec la visite de Tiger Woods, y'en aurait pas eu de photo à la une. Et savez-vous quoi ? On s'en fout.

Pourquoi toujours mesurer là performance sportive à l'aune médiatique ? On n'en parle pas dans le journal ? Pis après ? Ne me dites pas que vous vous êtes entraîné toutes ces années, juste pour qu'on en parle dans le journal ? C'est triste.

Si vous me demandez quels sont les deux plus grands athlètes du Québec contemporain, je vous nommerai Myriam Bédard et Pierre Harvey. Pour des milliers de sportifs, dont je suis, Pierre Harvey est l'ultime référence athlétique. On n'attend pas que ce soit écrit dans le journal. On sait. Même si on ne s'entend pas toujours sur ce qu'est " le plus grand athlète ", on sait que ce n'est pas Guy Lafleur. Ni Jacques Villeneuve. Ni Grudzielanek.

Il y a fort à parier que les historiens du sport retiendront que notre siècle fut celui où les coureurs kenyans ont rapproché l'Homme de la bête, en particulier du couguar et de la gazelle. Il serait étonnant quels retiennent que Vincent Damphousse a compté une moyenne de 28 buts par saison durant sa carrière par ailleurs fort respectable. On parle pourtant beaucoup plus de Damphousse que de Komen, Tergat, Kiptanui et Wilson Kipketer... Ce n'est pas un scandale. C'est tout simplement que la popularité des athlètes dépend, en premier lieu, de la popularité de leur sport. Quand on a compris ça, on arrête de s'exciter le poil des jambes parce que des rigolos prennent Michael Schumacher pour un géant. Schumacher est le premier à remettre les pendules à l'heure quand il dit, parlant de son compatriote Jan Ullrich, vainqueur du Tour de France " Je m'entraîne beaucoup, mais à côté d'eux ( les cyclistes ) je ne suis rien. "

À côté de Caroline Brunet non plus, il n'est rien.

Quant à votre question sur la séduction, madame, je vous ferai remarquer que c'est dans le sport qu'elle se pose le moins. Un joli cul n'a jamais fait gagner un dixième de seconde à personne sur une piste ou dans une piscine. Dans un bureau, je suis moins sûr.

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Rock'n'gais -

J'ai écouté tout l'été l'album d'une fille qui s'appelle Joan Osborne. Relish est le titre de cet album pas nouveau nouveau puisque sorti en 95 ( PolyGram ) et je me demandais si vous connaissez, si vous avez le CD, et surtout si dans le CD, il y a les paroles des tounes. Si y'a, seriez-vous assez gentils pour me les faxer ? Pas de paroles avec la cassette. ( Eh non, je n'ai toujours pas de lecteur CD. Mais s'il vous plaît, gardez vos remarques désobligeantes, et vos jokes plates sur le Moyen Âge ).

Joan Osborne donc. Elle continue la longue tradition des filles dans le rock, celles d'avant, celles qui ont mon âge ou pas loin, Nico, Faithfull, Stevie Nicks, RLJ, Patti Smith, Lovich, Hynde, etc. J'en omets des dizaines, toutes orphelines de Janis. J'ai toujours aimé le rock des filles, encore que celui de maintenant, celui des Fiona, Alanis et Paula Cole, et plus encore la gang " coffee-house ", Colvin, Crow, Chapman me laisse un peu tiède.

N'empêche. Elles tournent beaucoup dans mon salon grâce à - ou à cause de - ma fiancée middle of de road-là. C'est comme ça qu'au début de l'été, je suis tombé sur Joan Osborne.

- Whao, c'est qui ça ?

Quand tu jump dès la première toune, t'es parti pour jumper longtemps. La deuxième, c'était Man in the Long Black Coat de Dylan, Dans la troisième, y'avait un type qui jouait de l'harmonica écoeurant, et voilà, c'est la fin de l'été et j'écoute toujours Joan Osborne, en joggant, en vélo, à la pêche et avant de faire dodo. Alors si vous avez les paroles, mârci bien, comme dirait Gerry.

Un coup parti, auriez-vous aussi les paroles de Pieces of you, de Jewel, elles ne sont pas non plus dans la cassette. Jewel ? Une autre très spéciale... Anyway, je ne ferai pas votre éducation musicale ce matin, continuez donc d'écouter Sheryl Crow, c'est vrai qu'elle est bandante. Sa bouche, je veux dire.

Parlant musique, Il m'est arrivé un drôle de truc l'autre jour, j'étais en auto et tout à coup, je me suis mis à fredonner une chanson que je ne connais pas. C'est très étrange. Enfin, une chanson que je ne savais pas que je connaissais, je ne me souviens pas de l'avoir jamais entendue, ni fredonnée avant. Une chanson de Brel... La ville s'endormait et j'en oublie le nom / Sur le fleuve en amont / Un coin de ciel brûlait / La ville s'endormait et j'en oublie le nom / Et la nuit peu à peu / Et le temps arrêté...

Je ne savais pas que je connaissais cette chanson, pourtant les mots sortaient par coeur, et l'air était juste ( j'ai vérifié depuis ). Tandis que je chantais, il y avait une part de moi qui écoutait stupéfaite ( interdite ? ) : " D'où sors-tu ça ? " Je n'écoute jamais du Brel. Je suis sûr de n'en avoir pas entendu récemment, de toute façon, je change de poste dès les premières mesures quand c'est Brel, surtout la chanson pyromane qui voit souvent rejaillir le feu, anyway, par où est entrée cette ville qui s'endormait dont j'oublie le nom ? Et quand ? C'est fou, c'est comme s'il y avait une autre personne dans moi qui savait toutes les chansons de Brel.

Je vais peut-être la laisser chanter. Même si je n'aime pas beaucoup Brel. Qu'est-ce qu'elle est jolie cette chanson... La ville s'endormait et j'en oublie le nom / On m'attend quelque part / Comme on attend le roi / Mais on ne m'attend point / Et je sais que l'on meurt de hasard / En allongeant le pas...