Le lundi 5 juillet 1999


Les chromés
Pierre Foglia, La Presse, Tour de France

Le Tour de France, c'est une semaine de trop : la première. Le tour se joue dans les contre-la-montre et dans les montagnes. La première semaine est une concession faite à une race de coureurs un peu particulière, une race d'extravagants extravertis: les sprinters. Les sprinters sont les rapers du vélo, les nègres chromés de ce sport entièrement blanc.

La première semaine du Tour de France, c'est la semaine Cipollini, le dandy magnifique. Je ne sais pas pourquoi il n'a pas gagné hier. Il devait être en train de regarder les filles. Il gagnera demain ou après.

Hier, à Challans, c'est le plus timide qui a gagné. Très original, la timidité, pour un sprinter. L'Estonien Jaan Kirsipuu est ce genre de sprinter qui se laisse emporter et ballotter par la houle furieuse des attaques du dernier kilomètre comme s'il se trouvait là par hasard. On ne le voit pas venir. S'il jouait au hockey il serait Michael Bossy, voyez le genre ? Il gagne toujours par un demi-centimètre à la dernière demi-seconde. Ça, ça fâche les autres ! Merde d'où il sort lui?

Il y en a un autre comme Kirsipuu dans le peloton, l'italien Nicola Minali. Mais le meilleur de tous les sprinters, je vous le répète, c'est Mario Cipollini. C'est lui qui va gagner aujourd'hui à Saint-Nazaire.

Ou alors ce sera le Belge Tom Steels, vainqueur de quatre étapes l'an dernier.

Ou alors l'Allemand Erik Zabel. Ou rebelote Kirsipuu, ce n'est pas impossible. Ou encore un de ces quatre-là: O'Grady, Minali, Martinello, McEwen.

Et si aucun de ceux-là ? J'aimerais bien. Ça voudra dire qu'il y aura eu une course, avant le dernier kilomètre.