Le dimanche 18 juillet 1999


Petite misère
Pierre Foglia, La Presse, Tour de France

Vous n'entendrez pas parler de Tyler Hamilton d'ici la fin du Tour. Il n'est pas là pour faire parler de lui, ni pour gagner une étape. Il est là pour aider Lance Armstrong en montagne. Dans l'Alpe d'Huez, par exemple, c'est Hamilton qui roulait à bloc en tête, à bloc pour décourager les grimpeurs d'attaquer Armstrong. Au bout de son sacrifice - et de son énergie - il s'est laissé glisser vers l'arrière et a terminé, je ne sais pas, 42ème. Peu importe. Les connaisseurs de vélo ont apprécié: une job exemplaire de super plombier. Un Bob Gainey.

Savez combien gagne Tyler Hamilton pour son travail obscur? Environ 250 000 $ par année. Je parle de Hamilton parce qu'il est presque notre voisin (il vit à Boston) et parce qu'il est logé à la même enseigne que les autres bons plombiers du Tour de France qui gagnent aussi autour de 200 000 $. Ils ne sont pas les plus mal nantis. Les simples soldats des équipes moins fortunées, par exemple Bigmat-Auber ou Cantina Tollo, gagnent moins de 100 000 $ par année. Et ce sous-prolétariat de la pédale englobe plus de la moitié de tous les coureurs professionnels.

Une quinzaine de vedettes, dont Ullrich, Pantani, Virenque, Armstrong, Cipollini, Bartoli, Jalabert, Olano, dépassent le million. Petite misère quand l'on compare aux fortunes consenties aux joueurs de baseball, basket, hockey, soccer, golf, tennis et aux pilotes de Formule 1.

La victoire dans le Tour rapportera 700 000 $ à Armstrong qui s'empressera (c'est la tradition) de les remettre à ses coéquipiers dont Tyler Hamilton.

En passant, je vous signale que c'est ce même Hamilton qui détient le record de la montée annuelle du Mont-Washington (au New Hampshire), record qui lui a valu une... Audi Quattro, 60 000 $ pour moins de dix kilomètres. C'est à peu près ce qu'il va gagner pour 21 jours de course et 4000 kilomètres. C'est fou de même le vélo.