Le vendredi 9 juillet 2004


Soirée de larmes
Pierre Foglia, La Presse

Vers Athènes
TORONTO

(Sophie Simard n'ira pas à Athènes, mais elle s'en remettra)

Il y a des soirs comme ça, pour pleurer. En larmes, Marianne Limpert. En larmes, Joanne Malar. J'y reviendrai. Tout avait commencé, mal bien sûr, pour la grande Sophie Simard dans le 200 libre. Elle était si calme, si certaine d'atteindre son standard. Et son entraîneur Michel Bérubé (Rouge et Or de l'Université Laval) ÉTAIT tout aussi serein :
C'était clair dans ma tête. Sophie avait été parfaite en préliminaires ce matin. On a tellement travaillé pour arriver à cette finale. Il ne pouvait rien arriver de mal. Je n'ai jamais été aussi peu nerveux avant une épreuve.

Quand avez-vous commencé à l'être ?

Dès le départ ! Dès les premières coulées, tout de suite après le plongeon. Quelque chose n'allait pas. elle n'était pas dans son rythme. Et je savais que cela irait en s'aggravant. Je ne comprenais pas. C'est d'ailleurs ce qu'elle a dit elle aussi à la fin de sa nage : Je ne comprends pas. Et elle s'est mise à pleurer, évidemment.

Sa dernière longueur de piscine a été horrible, 31,24, pour un chrono final de 2:05,55, à trois secondes du standard olympique. Trois secondes. Ce n'est pas un échec. C'est un ratage. Je veux dire ce n'est pas comme si elle avait échoué en se battant avec tous ses moyens. C'est autre chose. Un trouble mécanique. A major malfunction, comme ils disent quand une navette se plante dans l'espace.

On ne jette pas l'éponge, a dit Michel Bérubé avec un enthousiasme qui sonnait faux. On va se battre jusqu'au bout. Sophie va tenter le tout pour le tout samedi dans le 100 libre.

On va arrêter de dire des folies. Je ne connais rien en natation, mais je sais lire une feuille de temps. Sophie n'a pratiquement aucune chance de faire son standard dans le 100. Et comme il n'y aura pas de relais...

Une immense douleur pour quelques heures, si ce n'est pas pour quelques semaines. Et puis elle sortira de son trou noir. Regardera les Jeux à la télé en pleurant encore un peu. À l'automne, elle retournera à l'université faire sa maîtrise en administration du sport. Et un matin de l'hiver prochain, ce sera à la fin janvier, ou au début mars, elle retournera à la piscine...

À Pékin, elle aura 29 ans.

La sortie est plus douloureuse pour Joanne Malar qui était toujours, à 28 ans, la petite fille gâtée de la natation canadienne. Elle a échoué dans le 200 quatre nages. Sa spécialité. Et encore plus grande déception pour la presque Montréalaise Marianne Limpert (31 ans), qui a passé l'année à Baltimore avec l'entraîneur de Michael Phelps. Elle, il lui reste une chance dans le 100, une toute petite chance. Les deux, Malar et Limpert, s'en allaient vers leurs quatrièmes Jeux olympiques.