Le jeudi 10 mars 2005


C'est pas du sport
Pierre Foglia, La Presse

Saint-Luc ou Outremont ? Voyons-le d'un point de vue sportif. La dernière fois que je vous ai parlé, il y a trois semaines, c'était 4 à 2 pour Outremont et on s'en allait vers une écrasante victoire de l'équipe du recteur Robert Lacroix, mais dans un climat malsain, de partie soi-disant arrangée. Certains -- qui excitaient la foule, bête comme toujours --, certains accusaient même l'arbitre en chef, et une certaine presse, la mienne notamment, de s'être laissé acheter par les propriétaires de l'équipe Lacroix.

J'ai senti à ce moment-là que le match allait basculer. Je ne connais rien à la santé, aux hôpitaux et à la politique, mais on ne me passe rien en sport. Notez-le, alors que la victoire semblait acquise aux joueurs d'Outremont, j'ai écrit il y a trois semaines de cela : M. Charest ne choisira pas un site. Il choisira le moindre mal pour le Parti libéral. Et je crois que ce sera Saint-Luc. Peut-on être plus dans le mille, plus « drette sur le piton » ?

De fait, Saint-Luc a d'abord égalisé, puis pris les devants grâce au grand Daniel, médiocre capitaine en son temps, mais qui a fait merveille sur cette unité spéciale, pif, paf, deux buts chanceux et à la limite du hors-jeu. Mais c'était 6 à 4 pour Saint-Luc et l'affaire semblait définitivement dans le sac, quand, coup de théâtre, un autre ex-capitaine, le grand Lucien, s'emparant d'une rondelle libre au centre de la glace a traversé la patinoire (sur une jambe) pour aller scorer... contre son propre camp. Enfin, c'est ce qu'il semblait. Mais peut-être s'est-on toujours abusé sur son véritable camp.

Oh ! a fait la foule médusée.

Saint-Luc devrait l'emporter quand même, mais jusqu'à la fin ce match aura tenu le public en haleine pour les mauvaises raisons. Cela aurait dû être un grand match opposant deux styles, deux visions, tiens, comme une finale de la Coupe du monde de soccer qui opposerait le Brésil à l'Allemagne. Le style utilitaire des Allemands contre les Brésiliens qui-en-font-toujours-trop-mais-c'est-bien-plusse-beau.

Cela aurait pu, cela aurait dû être un match comme ça. Mais dès le début, les accrochages, l'anti-jeu et quelques hooligans ont empêché les deux équipes de s'exprimer pleinement. Le genre de match un peu désolant où, à la fin, les deux équipes sur le terrain perdent. C'est la foule qui gagne. C'est pas du sport. C'est pas de la démocratie non plus, quoiqu'on en dira.

LES ÉTUDIANTS --

Bien avant le chambardement ministériel qui devait mener M. Jean-Marc Fournier au ministère de l'Éducation -- à l'étonnement général sauf au mien, je vous dis pourquoi à l'instant --, bien avant cela donc, je félicitais M. Fournier, alors ministre du Sport (et des Affaires municipales), pour sa fermeté dans le dossier des Championnats du monde de natation et j'ajoutais : « On aimerait le voir à l'Éducation celui-là. » Me voilà bien embarrassé.

Je sais, M. Charest que vous êtes un fidèle de cette chronique, j'en suis flatté, mais vous ne devriez pas prendre tout ce que je dis au pied de la lettre. Parfois j'écris absolument n'importe quoi, je crains que ce soit le cas quand je vous ai suggéré de placer M. Fournier à l'Éducation. Fallait pas m'écouter, il est bien trop fendant pour cette job-là.

Et puis arrêtez de dire que les étudiants sont des enfants gâtés. J'ai un voisin qui n'a pas encore son bac, mais qui vous doit déjà, enfin au gouvernement, 12 000 $. Vous me répondez bien sûr qu'au même âge, au même niveau, l'étudiant ontarien est plus endetté que mon petit voisin. Pis ? Pourquoi ce serait pas différent ici ? Paraît qu'on paie plus d'impôts qu'en Ontario, alors ce ci devrait compenser cela, non ? Au lieu de diminuer les impôts comme vous vous proposez de le faire, laissez-les donc comme ils sont, et réinvestissez les 103 millions que vous avez retirés l'an dernier du régime de prêts et bourses.

Arrêtez de dire aussi que cette grève générale, c'est du temps perdu. Savez-vous, monsieur le premier ministre, qu'il n'y a presque plus d'étudiants en sciences humaines dans les universités québécoises ? Sont tous, ou presque, en gestion de quelque chose. La grève leur donnera un cours accéléré en sciences humaines, la grève fera le plus grand bien à ces futurs cadres moyens qui auront des enfants de taille moyenne, qui mangeront à heures régulières, et s'inscriront tous en marketing à l'UQAM. Quand bien même ils prendraient quelques semaines de leur vie pour foutre le bordel, cela mettra un peu de fantaisie dans leur vie et dans le Québec aussi, bien drabe ces jours-ci.

MONGOLERIES -- Je suppose que doivent se tenir prochainement des jeux sportifs spéciaux pour handicapés mentaux puisque nous avons reçu de leur fédération la bonne terminologie à utiliser avec ces athlètes spéciaux. On n'est plus ici dans le politiquement correct, on est dans le délire le plus débile, les vrais mongols n'étant pas ceux qui souffrent de mongolisme, mais ceux qui ont concocté cette putain de terminologie. Ces gens-là ne comprennent pas que plus ils essaient d'être corrects, moins ils le sont. Plus ils tarabiscotent leurs formules, plus ils atteignent l'effet contraire, plus ils distinguent le handicapé en faisant ressortir son handicap.

À commencer par personne déficiente. Pourquoi personne ? Que voulez-vous que ce soit d'autre qu'une personne ? Un légume ? Un minéral ? Un lapin ? On voit bien que c'est une personne. Alors pourquoi le dire ? Ne sentez-vous pas le dire, c'est en douter ?

Ai-je dit personne déficiente ? S'cusez. Il faut dire : Personne ayant une déficience. Question : quand tu souffres d'une déficience, t'es pas déficient ? Quand tu souffres d'un rhume, t'es pas enrhumé ? Ai-je dit souffrant d'une déficience ? S'cusez encore. Ayant, présentant, une déficience, mais pas souffrant. Parce que souffrir, c'est négatif ! Les déficients ne souffrent pas de leur déficience, c'est évident.

Que diriez-vous alors de JOUISSANT de leur déficience ? Ah non ? Pourquoi ? Y jouissent pas, vos mongols ?