Le jeudi 19 juillet 2007


Ces fruits que l'on jette
Pierre Foglia, La Presse

La scène se passe au marché Jean-Talon. Je ne nommerai pas la fruiterie, mais c'est sans doute la plus chic du marché, elle fournit les grands restos, j'ai vu là des célébrités et même parfois de ces dames qu'accompagne leur chauffeur qui porte le panier. Les habitués du marché auront reconnu l'endroit, je le ne nommerai pas, je ne vise pas particulièrement ce commerce-là, je vise la pratique de l'ensemble des fruiteries.

Je cherchais ce jour-là des fruits à confiture, j'avise des pêches magnifiques, de ce rouge brique appétissant qui nous dit qu'elles sont bien mûres, en spécial à 90 cents la livre. Le gérant ne manque pas de me souligner qu'elles sont normalement à 3,90$: «Vous faites une très bonne affaire, monsieur.» Encore un peu il me félicitait et me levait le bras, comme on le fait pour un gagnant dans un quiz américain.

J'en achète une dizaine de livres. «Elles vous auraient coûté 25$ ou plus au prix régulier», en remet le gérant.

Je rentre à la maison tout fier de mon butin. J'en pèle une au couteau. Wouache. Fuck. Pas pourrie, non. C'eût été normal, on enlève le pourri, la partie saine fait généralement d'excellente confiture. Mais elles n'étaient pas pourries, elles étaient comme le sont trop souvent les fruits ici, farineuses, filandreuses surtout, sans aucun jus. On ne dirait pas qu'on revient du marché, mais du Canadian Tire où l'on a acheté un de ces produits vaguement pâteux dont on se sert pour calfeutrer une fenêtre disjointe.

Ni bonnes à manger. Ni bonnes à cuire. À jeter.

Tiens, Foglia s'est fait fourrer au marché et il en fait une chronique, êtes-vous peut-être en train de vous réjouir. Si cela peut vous faire plaisir, je m'étais déjà fait fourrer la semaine précédente, à la fruiterie voisine de celle-ci, sans doute la seconde plus chic du marché, où j'ai mes habitudes. Des pêches encore. Celles-là pour manger au couteau. Aucun jus. Aucun goût. Même texture d'étoupe. À jeter aussi. Délicieuses, m'avait pourtant dit le propriétaire qui me connaît.

Des accidents? Pas du tout. À longueur d'année, une fois sur trois, je jette les fruits que j'achète. Qu'ils viennent du Métro, du marché Jean-Talon, l'été, l'hiver, pêches, nectarines, prunes, abricots, cerises, bleuets, l'autre jour des groseilles si infectes que même la mouffette les a recrachées. Une fois sur trois, je me fais fourrer quand j'achète des fruits autres que des bananes ou des pommes ou des citrons. Une fois sur trois, je les jette.

Je ne suis pas en train de chipoter, ni de faire une dégustation, je ne vous parle pas de fruits un peu verts, ou un peu blets, ou pas assez sucrés, je vous parle de fruits véritablement impropres à la consommation.

Non seulement c'est du vol, mais c'est outrageant. Combien de fois en arrivant à la maison, j'ai eu l'envie de retourner au marché, d'aller voir le fruitier: «Goûte ça, bonhomme, dis-moi pourquoi tu vends des fruits qui ne sont ni bons à manger, ni bons à cuire? Ni bons pour la mouffette?»

L'épicier ne vend pas du lait qui est tourné. Le boulanger ne vend pas du pain moisi. Ces mêmes fruitiers qui vendent aussi des légumes, ne mettraient pas des carottes ni des salades pourries à leur étalage. Pourquoi les fruits? Au prix où ils sont? Vous avez vu le prix des cerises? Des pêches de jardin? Je suis fou de figues fraîches. Ce n'est pas leur prix exorbitant qui me retient d'en acheter, c'est qu'à ce prix-là, une fois sur trois, sont pas mangeables.

On trouve en ce moment, au marché, des montagnes de mangues. Une sur deux est blette, l'autre est succulente c'est vrai, mais pourquoi l'achat d'une mangue devrait-il s'apparenter à une loterie? Pourquoi le fruitier ne fait pas le tri? Il le sait très bien qu'une mangue sur deux est pourrie. Pourquoi la laisse-t-il là? Pour la vendre, je sais bien. Ça me rappelle la joke du gars qui va aux champignons. En revenant, sa femme lui dit: «T'es sûr qu'ils sont bons tes champignons?» «On s'en crisse ma chérie, c'est pour vendre.»

À quand des inspecteurs qui, au lieu d'aller voir s'il y a des coquerelles dans les toilettes des restaurants chinois (oui, y'en a), iraient retirer des étals ces fruits que l'on nous vend au poids de l'or et que l'on jette sans y toucher dans le compost, au poids de la merde?

TRANSPORTS - Dans le même esprit de protection du consommateur, j'aimerais parler avec un représentant de la compagnie Air France. Je n'ai réussi à joindre personne hier, exprès, pour voir, je n'ai pas pris les raccourcis des journalistes, et j'ai vu mon vieux! Je suis surtout écoeuré de faire le quatre pour les réservations, je ne veux pas réserver, il se pourrait même que je ne réserve plus jamais de billet sur Air France si ce que me rapportent plusieurs cyclistes est exact.

Voici. Est-il exact qu'Air France facture 150 euros par bicyclette pour un vol Montréal-Paris? Aller simple? Donc pour un couple, aller-retour, 600 euros? Environ 850$? Question subsidiaire: ça va, la tête?

Oui, je suis allé vérifier sur votre site. Non, ce n'est pas clair du tout. Parfois la boîte de vélo est considérée comme une valise (avec surcharge quand ça dépasse 23 kg) et parfois, bang, c'est 150 euros. On parle aussi sur votre site, sans rien préciser, d'une autre réglementation pour les vols intérieurs. Un ami qui vient de revenir de Barcelone a eu la surprise de se faire arnaquer de 150 euros à Charles-de-Gaulle (alors que cela ne lui avait rien coûté à l'aller). Quand il s'est plaint, on a lui dit: «Estimez-vous heureux qu'on ne vous réclame rien pour la portion Barcelone-Paris.»

Seriez-vous assez aimable pour me débrouiller tout ça. Mettons un cyclo qui s'en va pédaler les Pyrénées. Combien il lui en coûtera, pour son vélo, pour un vol Montréal-Paris-Toulouse et retour. Tous les cas de figure. Merci de répondre rapidement, j'ai d'autres amis qui attendent pour savoir s'ils doivent plutôt réserver sur Air Transat, c'est gratuit les vélos sur Air Transat.

Question subsidiaire encore: la politique vélo d'Air France est-elle applicable par les affiliés d'Air France comme KLM, par exemple? Merci, z'êtes bien blood.