Le mardi 18 septembre 2007


Glaces italiennes
Pierre Foglia, La Presse

Je sortais du Manneken Pis, je tombe en arrêt devant ce qui m'a semblé être une nouvelle enseigne sur ce bout de rue Champlain entre la track et les écluses: Max et Lily, glaces italiennes. Ciel! Un vrai glacier à Saint-Jean? Les meilleures glaces à quelques portes des meilleures gaufres? Deux perles dans la même huître?

Stracciatella. Baccio. Tiramisu. Noix de coco. Donnez-moi à la vanille, madame.

La crème glacée, ça s'essaie à la vanille. C'est pas compliqué, la crème glacée. Des jaunes d'oeufs. Du lait ou de la crème. Plus il y a de jaunes d'oeufs, plus il y a de crème, meilleure elle est. Verdict pour celle-ci: une des meilleures crèmes glacées italiennes que j'ai mangées hors d'Italie. Mieux que le Bilboquet (c'est facile). Mieux que le Havre aux glaces du marché Jean-Talon. J'étais drôlement content. J'en parlais à tout le monde. Max et Lily, rue Champlain, à Saint-Jean.

La semaine d'après, tout innocemment je demande à la dame: sont faites où, les glaces? Je voulais dire, en arrière dans la cuisine, à la cave?

Ne sont pas faites ici, me répond-elle après une seconde d'hésitation.

Ah non?

Sont faites à Plessisville. C'est un produit des Délices de l'érable.

Les Délices de l'érable sont une branche de la coopérative Citadelle. Les Délices de l'érable exploitent quatre cafés-pâtisseries à cette enseigne, un sur la jetée à Dorval, un rue Saint-Jean à Québec, un dans le Vieux-Montréal et un qui fait aussi bistrot à Vancouver. En plus de fournir de la crème glacée à 40 points de vente, dont Max et Lily.

Quarante points de vente! Et moi qui imaginais un artisan-glacier en train de battre ses jaunes d'oeufs au fouet en y incorporant tout doucement sa crème chaude. Pas de crème là-dedans, que du lait ou de l'eau pour les sorbets. Pas de jaunes d'oeufs non plus. La base pour les 37 saveurs offertes vient effectivement d'Italie, une poudre à gelato. De la poudre. DE LÀ POUDRE!

Déçu? Vexé surtout. Mettez-vous à ma place. Je suis presque à la fin de ma vie et j'ai amassé quoi comme connaissance? En quoi suis-je expert? Je sais, à fond, quatre ou cinq choses, pas plus. Je sais tout du sport. Je sais tout des confitures de mirabelles. Je sais tout des pâtes alimentaires. Je sais tout de Louis-Ferdinand Céline. Je croyais tout savoir de la crème glacée, mais voilà qu'après 67 ans de stracciatella, de zabaione, de nocciola, de gianduia, de fior di latte, voilà que je prends de la poudre de gelato -de la poudre, Seigneur!- pour de la crème. Je ne sais presque rien et ce que je sais, je ne le sais pas.

En voilà des histoires, me dites-vous. Elle est bonne ou pas? Vous venez de nous dire qu'elle était la meilleure crème glacée italienne que vous ayez goûtée hors d'Italie.

Goûté, dites-vous. Le goût n'est pas que sur la langue. Le goût est pour moitié les mots pour le dire. Crème fraîche. Crème fleurette. Crème d'Isigny. Crème tiédie au bain-marie dans laquelle on verse, tout doucement, en ruban, les jaunes d'oeufs battus. Un ruban, oui, c'est comme cela que l'on dit. Le goût vient pour moitié des mots.

Moi: et cette base que vous importez d'Italie, quelle forme a-t-elle?

La voix au téléphone: c'est une poudre.

Madona Santa! Une poudre!

INSERTION AUTOMATIQUE - Les sujets qui fâchent. Par exemple: le complot du 11 septembre. Toutes les semaines, au moins un moron, une moronne m'envoient une vidéo, une étude, un article de journal russe qui prouve que ce ne sont pas les avions qui ont fait tomber les tours du World Trade, qui prouve qu'il n'y a jamais eu d'avion sur le Pentagone. Autre sujet qui fâche: les sautés de la réforme de l'orthographe. Autre sujet encore: ces gens qui m'envoient une copie du courriel qu'ils adressent à un collègue. C'est alors que je deviens facilement primesautier. Genre «calicez-moi patience». Genre «fuck off». Il se trouve des lecteurs pour exiger des excuses. Je leur en fais volontiers, ils ont raison, c'est là un niveau de langage inacceptable.

Hélas, hélas, je peux faire bien pire que «calicez-moi patience» ou que «fuck off». Savez-vous ce que j'ai fait une fois? J'ai tapé la petite formule passe-partout suivante: je vous remercie de votre commentaire, je vous souhaite une bonne journée, pf. Attendez, c'est pas fini. J'en ai fait une insertion automatique dans Word, lui ai attribué une touche de raccourci, si bien que je ne suis même pas obligé de taper cette formule, je la fais apparaître d'un seul clic sur la touche de raccourci.

Clic. Je vous remercie de votre commentaire. Je vous souhaite de joyeuses Fêtes. Oups s'cusez, je ne l'ai pas corrigé depuis les Fêtes l'an dernier.

DIEU EST AMOUR - Quand j'échappe dans une chronique une expression comme «crisse d'ensoutané», c'est sûr que ça va jumper au jubé. C'est sûr que M. Côté va rebondir. Il rebondit chaque fois que je mets mon pied dans le bénitier. Vous êtes ignoble, m'écrit-il, et plus d'autres gentillesses, mais c'est la fin qui est intéressante: Et dire que Dieu vous aime. C'est extraordinaire.

Je ne vois rien d'extraordinaire là-dedans, monsieur. On parle bien du dieu des chrétiens? Il aime tout le monde. C'est pas comme si c'était Allah ou Iahvé. Je ne pourrais jamais écrire dans cette chronique «crisse d'iman» ou «crisse de rabbin». C'est dire la grande ouverture de la chrétienté.

PLOGUE VÉLO - Vous ai-je déjà parlé de Marie-Josée Gervais? J'aurais dû. Mais là je n'ai plus de place. Disons que Marie-Josée est une des bonnes (et rares) raisons d'aller à Shawinigan. Mais pas samedi qui vient. Samedi, elle ne sera pas à Shawi. Elle sera à l'entrée du parc national de la Mauricie, à Rivière-à-la-Pêche où elle donnera le départ des trois cyclo sportives qu'elle a organisées, une de 30 km, une de 55, et la vraie, le défi Vélo Mag, 105 km. Vous avez déjà pédalé le parc national de la Mauricie? Un des plus beau parcours de vélo de la province. Samedi, la circulation automobile y sera interdite, juste des vélos. Je ne sais pas s'il reste des places, Marie-Josée ne voulait pas plus de 600 cyclistes au départ, pour les horaires, le coût d'inscription, appelez-là à 8 196 938 415. Aussi www.cyclomauricie.com. (Note: faut aimer les bosses, y'en a au moins autant que dans cette chronique.)